Les voileux se transforment en routards

Le périple est terminé, 50.000kms en un an, Hervé repart vers l'Ouest américain avec d'autres français. Nous avons retrouvé notre bateau à Green Cove Springs et début mai nous voguerons vers les Bermudes avant de rejoindre Flores, première île de l'archipel des Açores. Le retour dans notre chère Bretagne est prévu vers le 15 août.

Adresse du blog bateau :
https://retourdegalbord.blogspot.com/

mercredi 6 juin 2012

LE QUEBEC

                                                                        

Pour tout vous dire, cette province du Canada, avec New York, le parc du Yellowstone, le Colorado et la Californie était une des grandes étapes de notre virée en Amérique du nord. Après l’avoir parcouru pendant un mois et nous y repasserons en juillet, je peux vous dire que tant sur le plan humain que sur le plan des paysages, nous avons été gâtés.

Depuis les Antilles en bateau nous avons rencontré beaucoup de québécois ainsi qu’en camping-car aux USA et tous nous ont donné plus qu’envie de visiter ce pays où nous comptons tant de cousins. Mais d’abord quelques données : sa superficie est trois fois celle de la France pour 7,7 millions d’habitants dont presque la moitié vit dans la région de Montréal, cette région étant très excentrée puisqu’à l’extrême ouest de la province, touchant l’Ontario.
Le fait que nous nous trouvons dans un pays de langue française contribue aussi beaucoup à l’apprécier puisque nous pouvons communiquer normalement sans la barrière linguistique. Ensuite leur farouche résolution à défendre notre langue contre les anglicismes force notre admiration, nous qui employons ceux-ci sans presque nous en rendre compte, à commencer par moi-même plus haut en employant le terme de camping-car alors qu’ils nomment « motorisé » ce type de véhicule !
Nous l’abordons donc ce dimanche 6 mai au poste frontière de La Colle. Après quelques questions aux québécois rencontrés au camping de New York, nous nous attendions à une fouille en règle de notre véhicule, les denrées et la quantité d’alcool importées étant très limitées. C’est donc avec un certain soulagement que la douanière après quelques questions de sa guérite à moi, ma vitre ouverte, nous tamponna nos passeports en nous accordant un visa jusqu’au 31 août. La seule remarque fut l’ordre d’éteindre notre « cellulaire » lorsque notre ami Patrick nous appelait à cet instant précis.
Après la succession de forêts et de lacs du New Hampshire et du Vermont, nous trouvons ici au nord du lac Champlain une région très plate et très agricole qui continuera jusqu’à Montréal et donc les rives du Saint Laurent. Quel étonnement aussi pour ma part que le premier tracteur agricole vu sur la route fut un tracteur « Bélarus », tracteurs soviétiques que j’ai commercialisé en Bretagne pendant plus de vingt ans, et j’en verrai bien d’autres en allant plus vers l’est surtout en Gaspésie. Notre premier but étant de voir ce fleuve mythique, nous le rejoignons au village de Beauharnais et nous n’avons pas été déçus par sa grandeur qui ne fera pratiquement que croître au fur et à mesure que nous le descendrons.  
Nous avions prévenu Isabelle et Patrick de notre arrivée imminente et le coup de fil au poste frontière était pour nous inviter à leur rendre visite à leur maison de Notre Dame de l’île Perrot. Nous les avons connus à Georgetown aux Bahamas puis à Nassau pendant mon séjour hospitalier, ils étaient partis pour environ 6 mois avec leurs deux enfants de Floride et remontaient ensuite leur voilier au lac Champlain. Ce furent de chaleureuses retrouvailles avec un bon repas préparé par Patrick, nous avons pu stationner notre motorisé devant chez eux et profiter de leur salle de bains. Ce fut un moment trop court mais nous comptons bien passer les revoir en juillet.
Le lundi nous nous rendions à Montréal pour commencer notre visite et revoir notre nièce Ségolène qui y fait des études d’anthropologie. Après trois jours de visite, le bilan sera mitigé, il y a des quartiers intéressants, une vieille ville préservée malgré les buildings tout proches, mais surtout il y a le St Laurent majestueux avec les îles Ste Hélène et Notre Dame sur laquelle se déroule le GP de F1, et il y a le Mont Royal, colline boisée avec de beaux points de vue, rendez-vous de tous   les amateurs de marche, vélos et autres joggeurs, c’est le « Central Park » montréalais. Cependant on n’y a pas vraiment ressenti d’âme, les quartiers très différents se juxtaposent, mais il faudrait sûrement y vivre pour l’apprécier à sa juste valeur.

Isabelle et Patrick nous avaient prévenus : la langue officielle est le français mais dans le centre commercial on vous accueillerait presque par un « Hello » au lieu d’un « bonjour », on mesure ici le fait que les nouveaux immigrants sont plutôt de langue anglaise et l’Ontario est aussi très proche. A tel point que ayant épuisé nos livres nous entrions dans une grande librairie de la très commerçante rue Ste Catherine et quelle ne fut pas notre surprise d’y voir une pancarte signalant le rayon « livres en français » la partie réservée aux livres anglais étant considérée comme la norme. Je vous rassure quand même car ayant dit notre étonnement à l’office du tourisme la personne nous apprit que c’était la succursale d’une chaîne de librairies anglophones.

Ceci dit nous avons retrouvé des choses bien françaises, du bon pain, de vrais fromages et l’accent typiquement québécois avec des mots qui ont disparu depuis belle lurette de notre vocabulaire, leur manière de vivre évidemment beaucoup plus française qu’anglo-saxonne, le courant passe tout de suite ainsi que le tutoiement très similaire à nous bretons. C’est donc plus par les gens que nous apprécierons ce pays et le 10 mai nous mettions cap au nord, direction Mont Tremblant, plus précisément Lac Supérieur pour retrouver Diane et André rencontrés en Floride près de Daytona et avec qui le courant était tout de suite passé. 

André possède un terrain boisé en bordure de deux rivières avec une île au milieu qui l’occupe beaucoup, en attendant de pouvoir y accéder par un pont son beau-frère et lui  ont aménagé une ingénieuse tyrolienne, regardez là sur les photos. Nous y avons passé trois jours formidables à visiter, travailler à débroussailler ses chemins, heureusement qu’il avait du matériel Stihl que je vendais ! Diane et André, sa sœur Denise et Marc son mari nous ont accueillis « royalement » . On devrait les retrouver fin juillet dans les Rocheuses.

Une visite au Québec ne se conçoit pas sans une visite chez un récolteur de sucre d’érable. L’occasion faisant le larron, dans mon cas André m’ayant entendu évoquer un bruit de suspension, il téléphone à un de ses bons copains garagiste entre Montréal et Québec pour convenir d’un rendez-vous et par la même occasion me parler sucre puisque Jean Pierre c’est son nom en est aussi producteur.

Jean Pierre et Suzanne nous feront visiter leur érablière, leur cabane à sucre avec forces explications sur la récolte et la réalisation du sirop d’érable à partir de l’eau qu’ils recueillent de chaque arbre avec une canule et un seau. Jean Pierre a fabriqué une bonne partie de son matériel et n’était pas peu fier de nous montrer leur fonctionnement. Pour mieux comprendre la récolte et la réalisation du fameux nectar il nous invita à visionner un film tourné par sa fille expliquant cette récolte ainsi que la fameuse « tire sur glace » : on fait couler le sirop chaud sur la neige, au contact du froid il se solidifie donnant de vrais sucres d’orge, désolé, d’érable !

Après cet épisode retrouvailles ou connaissances, nous nous retrouvons tous les deux pour aller découvrir la ville de Québec. Tout le monde nous a prévenus, c’est  la plus belle ville d’Amérique du nord ! On est d’accord, enfin on trouve une ville qui a une âme, des vieilles pierres, des fortifications, un port, bâtie à un endroit stratégique puisqu’en algonquin Kebec  veut dire : là où la rivière se resserre. Et puis il y a le château Frontenac, il ne date que de 1893 mais s’intègre parfaitement dans la vieille ville entourée de remparts. Le tout est très harmonieux pour une ville bâtie à flanc de coteaux, on n’arrête pas de descendre et monter. Et ici tout le monde parle français ! A part les touristes américains et canadiens anglophones bien sûr.

On fera ensuite un passage aux chutes Montmorency à 12kms de Québec. Elles sont plus haute de 30m que celles du Niagara mais beaucoup moins larges, pour nous le must en la matière restera celles d’Iguaçu entre l’Argentine et le Brésil.

Mais le clou de cette région est le parc national de la Jacques Cartier. A quarante-cinq minutes  de la capitale de cette province on se retrouve dans une vallée que l’on peut remonter sur une trentaine de kms avec des paysages grandioses, on y a fait de très belles marches et du kayak, on n’a pas encore osé affronter les rapides. On a tout appris sur la vie du castor et c’est très intéressant de pouvoir les observer tranquillement dès six heures du soir, bien occupés à consolider leur barrage. On a aperçu furtivement un orignal, sorte de grand élan et observé de très près un porc-épic qui n’a rien à voir question taille avec notre hérisson. C’est ici que l’on commence à prendre la mesure des paysages grandioses qui nous attendent.
Vue d'ensemble de la Jacques Cartier depuis "Les Loups"
 
La route entre ce parc et Saguenay se résume à une grande montée et une grande descente à travers forets et lacs sur plus de 100kms, malheureusement nous le faisons dans la pluie et le brouillard ce qui nous empêche d’en profiter. Saguenay est la ville et la rivière qui y passe venant du lac St Jean et se jetant à Tadoussac dans le St Laurent porte le même nom. Nous décidons d’aller tout de suite sur la rive droite au parc national secteur Baie Eternité et là on peut dire que le paysage vous en met plein la vue, le Saguenay est un fjord très encaissé et les balades sont somptueuses, nous monterons au sentier de la vierge. En 1881 un marchand qui en hiver transportait des marchandises sur la glace du fleuve, vit celle-ci céder sous ses pas, il en réchappa miraculeusement et en remerciement fit élever une statue de la Vierge Marie sur un promontoire rocheux du cap Eternité. Depuis un sentier  avec de très beaux panoramas y mène. Passage également au joli port de l’anse St Jean.



Nous voulions voir le lac St Jean, véritable mer intérieure de plus de 1000km² mais à part quelques sites, l’intérêt est assez limité. On nous avait prévenu de nous méfier des moustiques surtout dans cette région et cela n’a pas manqué. La nuit précédent notre visite au parc de la pointe Taillon où nous avons fait 40kms à vélo fut un véritable cauchemar. Dans la soirée quelques bibittes comme disent les québécois étaient à l’intérieur du véhicule mais nous avions beau en tuer, il y en avait de plus en plus à tel point que nous n’avons pu dormir qu’une heure ou deux. Au petit matin j’ai découvert l’endroit par lequel ils rentraient : l’ouïe d’aération de la hotte de la gazinière, sans doute que les odeurs de cuisine les attiraient. Aussitôt colmatée, il n’y avait plus d’intrus mais un sacré tableau de chasse.



Nous regagnerons assez vite la rive gauche de la rivière Saguenay avec de jolis sites comme Sainte Rose du Nord ou la baie Sainte Marguerite où vivent de mai à octobre une grande quantité de belugas, malheureusement les glaces de l’hiver ont emporté le pont permettant d’y accéder. Nous continuerons donc la descente du fjord vers Tadoussac.



Jacques Cartier débarqua à Tadoussac en 1534 et ce fut le premier comptoir d’échanges de fourrures avec les Amérindiens. C’est aussi le meilleur endroit pour observer les baleines car il y a peu de fond au confluent et les courants font remonter les micro-organismes dont se nourrissent plancton et krill, nourriture des cétacés. Nous irons donc en bateau sur le fleuve approcher des belugas et des baleines, nous en verrons plusieurs mais avec mon petit appareil photo il est très difficile de les prendre au bon moment. Tadoussac est aussi un très beau petit village donnant sur une très belle baie.



Il était temps de gagner la rive droite du St Laurent, nous le faisons de St Siméon à Rivière du Loup avec un ferry, pardon un traversier ! Il nous permettra d’aller dormir au parc du Bic près de Rimouski avant de faire route vers la Gaspésie.



La Gaspésie est au Canada ce que la pointe du Finistère est à la France, à quelques degrés de latitude près elles se font face mais la comparaison s’arrête là. Ici tout est plus grand vous l’avez déjà compris et beaucoup plus sauvage. La pointe est préservée par un parc national : le parc de Forillon. Nous y passerons deux jours et deux nuits passionnants à faire de grandes marches et à observer les animaux de très près. L’ours noir y est très présent et on a eu le bonheur de le voir passer devant nous à 20 mètres, Annick était plus impressionnée que moi qui m’efforçait de prendre le maximum de photos.  Les panoramas sont encore une fois éblouissants, que rajouter, rien sinon que vous dire de regarder les photos.
  

De l’autre côté de la baie il y a une autre merveille : Percé et son fameux rocher…percé d’une arche qui s’effondrera un de ces jours mais pour l’instant elle fait le bonheur des photographes.



Notre premier passage au Québec  se terminera par la côte nord de la baie des Chaleurs ( !!!)  sans aucune comparaison avec ce que nous avons vu plus haut. Nous passerons au Nouveau Brunswick au fond de la baie à Campbellton commençant notre visite des « Provinces Maritimes ».
En conclusion, nous nous attendions à quelque chose de fort et cela a été très fort, tant au niveau humain que des paysages et de la faune. Le Québec est un pays à lui tout seul et on s’y sent comme chez soi.                       

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire