Les voileux se transforment en routards

Le périple est terminé, 50.000kms en un an, Hervé repart vers l'Ouest américain avec d'autres français. Nous avons retrouvé notre bateau à Green Cove Springs et début mai nous voguerons vers les Bermudes avant de rejoindre Flores, première île de l'archipel des Açores. Le retour dans notre chère Bretagne est prévu vers le 15 août.

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mardi 8 mai 2012

DE WASHINGTON A LA FRONTIERE CANADIENNE

                                               
 On vous avait quitté le 9 avril au sortir de la Shenandoah Valley, nous avons devant nous les grandes agglomérations du nord est des Etats Unis à visiter à commencer par la capitale : Washington. Je continuerai donc notre récit comme la lettre précédente état par état, en vous recommandant d’ouvrir parallèlement l’album photo de Picasa Web correspondant.
WASHINGTON DC : en réalité nous commençons notre visite ce lundi 9 avril par le Great Falls National Park qui est à cheval sur la Virginie et le Maryland mais à 20kms de la Maison Blanche, ce sont les derniers rapides du Potomac qui s’assagit et devient navigable au niveau de la capitale avant de se jeter dans la Chesapeake Bay. Ce sont des rapides impressionnants qui se fraient un passage parmi une multitude de rochers. Parallèlement existe un canal qui fut autrefois utilisé commercialement mais qui ne l’est dorénavant qu’à des fins touristiques. L’ensemble forme un parc de 800ha très prisé des habitants de la capitale.

Washington n’est pas un état, c’est un district, leurs habitants ne peuvent voter qu’aux présidentielles, pas aux législatives ni aux sénatoriales. Leur rancœur à ce sujet se manifeste sur leurs plaques d’immatriculation où l’on peut lire : « Taxé sans représentation » ! Nous nous demandions où laisser notre véhicule pendant notre visite de la ville, heureusement nous passerons trois nuits au Green Belt National Park à une demie heure à pied du métro dans un parc parmi les daims et les écureuils.

La ville en elle-même est différente des autres grandes villes américaines, pas de gratte-ciels, de larges avenues et dans le centre des bâtiments officiels imposants. Ce centre est très ordonné autour d’une grande pelouse avec plusieurs plans d’eau, « The Mall », à l’est le Capitole, à l’ouest le Lincoln Memorial, au milieu l’équivalent de notre obélisque de la Concorde : le Washington Monument et en face de lui au nord la Maison Blanche. Au milieu à l’ouest figurent tous les mémorials des guerres où sont morts les soldats américains. Tout autour se retrouvent un grand nombr e de musées, tous d’accès gratuit appartenant à la « Smithsonian Institution » du nom d’un anglais qui en 1829 légua toute sa fortune aux Etats Unis sans y avoir mis les pieds. Son argent a été bien utilisé et les musées sont magnifiques et aux dimensions du pays.

MARYLAND : après deux jours de visite dans la capitale, nous retrouvons un port de plaisance et un très joli village à Annapolis où se déroule tous les ans un salon à flot semblable au Grand Pavois de la Rochelle. Ce sera ensuite Baltimore qui fut un temps (1830), la deuxième ville des Etats Unis et qui restera pour nous un coup de cœur, certainement du fait que le centre de la cité est le port et que tout s’articule autour de lui harmonieusement. Les vieilles maisons de Fells Point , le vieux quartier du port sont encore bien conservées. Nous finirons notre séjour dans cet état par un week end au Elk Neck State Park situé sur une presqu’île entre la Elk River et la fin de la Chesapeake Bay.

PENNSYLVANIE : nous quittons la côte pour l’intérieur des terres et plus spécialement le comté de Lancaster berceau d’une population un peu particulière : les amish. Issus des mennonites qui y sont aussi présents, les amish appliquent encore plus strictement les préceptes de la Bible. Au premier abord, on constate que la campagne est très vallonnée, les exploitations sont très rapprochées donc les fermes de surfaces assez modestes. Elles ont toutes des silos-tours pour stocker le fourrage et donc tout est tourné vers l’élevage. Ensuite on constate rapidement leur refus du progrès : leurs déplacements se font en « buggies », petites voitures à cheval fermées où on ne distingue que le ou la conductrice vêtus comme au XIXème siècle, les hommes portent la barbe, un pantalon à bretelles sur une chemise et un chapeau ; les femmes sont en robe unie de couleur terne et leurs cheveux jamais coupés sont regroupés en chignon dans un bonnet à l’ancienne. Ils refusent l’électricité, dans les fermes l’énergie est fournie par des moteurs thermiques. Le travail des champs est effectué avec des chevaux, dans le cas où il faut une prise de force un moteur thermique est installé devant l’outil. Ceux qui ne peuvent se passer de tracteur refusent les pneumatiques et ont des roues en fer. Le vélo est remplacé par une trottinette et il est curieux de voir les hommes se déplacer de cette manière. Ceci dit ils ont l’air heureux de vivre ainsi, nous nous sommes baladés à vélo sur les petites routes et tous nous ont salué très poliment avec le sourire. Ce qui est étonnant c’est de voir le contraste avec le reste des américains et leur mode de vie diamétralement opposé.

Buggies amish sur les routes


Après cette remontée dans le temps nous pensions nous arrêter à Philadelphie mais la pluie et le manque de stationnement pour notre véhicule nous en  dissuadèrent.
NEW JERSEY : après une nuit dans un camp à peine ouvert perdu en pleine nature, nous retrouvons  le 19 avril la côte atlantique au sud de la baie de New York à Belmar, toute cette côte est une plage et une succession de stations balnéaires, nous la remonterons jusqu’à la presqu’île de Sandy Hook qui ferme cette baie et d’où nous avons notre première vision de New York, faut dire que les gratte ciels de Manhattan se voient de loin. Afin de visiter tranquillement cette mégalopole le seul camping proche est celui situé à Jersey City très près de l’embarcadère pour Ellis Island et la statue de la Liberté ; celui-ci nous offre pour une semaine de présence la septième nuit gratuite. Mais surtout après un quart d’heure de marche on est au métro qui nous amène directement au World Trade Center au cœur de Manhattan.


Salle d'enregistrement des immigrés à Ellis Island

C’est donc de là que nous prendrons le bateau pour visiter Ellis Island où entre 1892 et 1924, 12 millions d’immigrants furent triés, c’est très impressionnant de voir ce musée, de lire les explications et témoignages de tous les européens qui y sont arrivés dans l’espoir d’une vie meilleure. A l’embarcadère de Jersey City une rétrospective relate que l’arrivée des immigrants asiatiques se faisait à San Francisco. Le bateau nous débarque ensuite à Liberty Island où l’œuvre de Bartholdi et Gustave Eiffel à qui l’on doit la structure salue tous les arrivants dans cette baie. L’intérieur étant en plein travaux il ne nous sera pas possible de la visiter mais cela reste une très imposante réalisation et un symbole de la Liberté, encore une fois cocorico !


NEW YORK : cette fois ci il s’agit de la ville et non de l’état du même nom sur le territoire duquel elle est située et qui remonte jusqu’au Canada mais que nous ne visiterons pas.
Que dire de cette ville qui n’a pas déjà été dit ? Je me bornerai  à nos impressions et pas à un exposé de ce que nous y avons fait. La première impression est évidemment le gigantisme des immeubles de Manhattan quand vous en êtes au pied dans les rues, ces dernières vous semblent étroites telles Wall Street qui paraît minuscule alors que symboliquement elle est toute puissante. D’autres quartiers sont plus « accueillants » comme China Town ou Little Italy, les commerces y sont plus vivants et moins standardisés. Nous avons fait l’expérience d’une messe baptiste avec de beaux chants Gospel à Harlem, mais la majorité des gens présents parlaient français et avaient le guide du Routard sous le bras, faut dire que c’était les vacances de Pâques et qu’on entendait parler notre langue absolument partout où le touriste doit se rendre. La ville (Manhattan) est toute en longueur puisque située entre l’East River et l’Hudson River, ce qui rend les déplacements en métro faciles de haut en bas, mais plus compliqués transversalement, cela tranche avec Paris qui est plus circulaire. Le plus frappant est le chantier du World Trade Center et la foule qui le visite, l’organisation de ces visites est assurée par des proches des disparus, le chantier est colossal et les deux tours seront remplacées par cinq autres très différentes en forme les unes des autres tandis que deux bassins au fond desquels de l’eau se déverse en permanence ont pris place à leur emplacement, les noms de toutes les victimes étant inscrites sur leur pourtour.
Un des emplacements des deux Twin Towers

Nous ne faillirons pas à la vue extraordinaire qu’on a depuis le 86ème étage de l’Empire State Building, comme vous pouvez le constater sur les photos c’est très impressionnant. New York est vraiment la ville des superlatifs mais cela va quelques jours, c’est une expérience à faire mais y vivre c’est une autre histoire…

C’est donc avec bonheur que nous retrouvons le calme des State Parks à Wading River au bout de Long Island, avec une grande plage faisant face au Connecticut et un parc où nous faisons de grandes balades et où nous rencontrons plusieurs « deers », cerfs de Virginie. Nous quitterons l’état de New York en prenant le ferry de Orient Point à New London dans le Connecticut ce qui nous fera éviter un retour par New York et par conséquent un détour d’environ 400kms.

CONNECTICUT : Nous y débarquons donc le 30 avril sous un beau soleil mais les cirrus dans le ciel annoncent un changement de temps, nous trouvons un camp à Old Mystic et nous y passerons la journée du lendemain à vous envoyer les nouvelles précédentes puisque la pluie ne s’arrêtera qu’en soirée. Le lendemain nous progresserons vers l’est en traversant des forêts et des forêts pour rejoindre l’état de Rhode Island.

RHODE ISLAND : Après Annapolis, l’autre grand nom américain de la voile est Newport, c’est là que se déroulaient les épreuves de la coupe America avant que les australiens la leur ravirent en 1983, c’est là aussi qu’en 1964 un jeune enseigne de vaisseau français arrivait vainqueur de la transat anglaise en solitaire partie de Plymouth, il s’appelait Eric Tabarly et allait insuffler la passion de la voile en France à tel point que nous sommes devenus en quelques dizaines d’année le premier pays constructeur de voiliers au monde. Nous fîmes donc notre « pélérinage » dans ce lieu mythique, quelques beaux voiliers se préparaient à rejoindre leur milieu naturel mais à part ces magnifiques unités on voit bien que nous n’avons rien à envier en France au niveau des infrastructures nautiques. L’autre particularité de Newport, du fait sans doute de son équidistance entre New York et Boston, est d’avoir attiré dès le XVIIIème siècle les plus riches familles de la côte est qui à la fin du XIXème siècle se firent construire sur le front de mer des « mansions », manoirs copiant les châteaux ou palais européens. Le problème dans le continent américain est que l’accès au bord de mer n’est pas libre comme chez nous, les propriétés privées en interdisent l’accès, eh bien les habitants de Newport ont réussi à faire plier ces riches propriétaires et une belle balade de 5kms, la « Cliff walk » permet de voir ces somptueuses résidences depuis ce sentier côtier.

MASSACHUSSETS : Nous sommes en Nouvelle Angleterre et la presqu’île de Cape Cod fut l’endroit où en 1620 accostèrent les occupants du Mayflower, croyant arriver en Virginie. Aujourd’hui c’est une destination très touristique avec au large les îles de Nantucket et Martha’s Vineyard. C’est d’ailleurs à Hyannis Port, lieu d’embarquement pour ces îles que passait ses vacances un certain John Fitzerald Kennedy.



Mais la capitale du Massachussets est bien sûr Boston, nous y passerons une journée le 4 mai, bien peu pour tout visiter mais dans les grandes villes le problème du stationnement est un vrai cauchemar, c’est par hasard que nous nous sommes retrouvés au terminus d’une ligne de métro avec un parking à 7 dollars pour la journée, ce qui nous a permis de visiter le centre ville. Le gros problème de ces grandes métropoles est que des gratte-ciels cotoient des bâtiments plus anciens et plus intéressants, noyant ainsi l’âme de la ville. A vrai dire, mais c’est toujours notre grand défaut, nous préférons flâner dans les ports et heureusement Boston en est un. Ceci dit cette ville est un grand centre d’affaires et bien sûr le siège des prestigieuses universités américaines telles qu’Harvard, Cambridge et le Massachussets Institute of Technology (MIT) qui donnent à la ville une population très jeune avec 500.000 étudiants.

NEW HAMPSHIRE : Nous le traversons rapidement en quittant Boston et le lendemain avant d’arriver dans le Vermont, nous n’avons pratiquement vu que des forêts et  les montagnes des Appalaches sur la fin.
VERMONT : Dernier état américain avant le Québec, c’est aussi les Appalaches et beaucoup de forêts. A force d’entendre aux Bahamas les navigateurs québécois parler du lac Champlain, nous voulions absolument le voir et nous avons passé une nuit fort agréable du 5 au 6 mai au State Park de Grand Isle. Le lac est une vraie mer intérieure toute en longueur (120kms environ) dont un petit douzième appartient au Canada. Nous sommes donc arrivés à l’entrée du parc mais nous nous sommes aperçus de suite qu’il n’était pas encore ouvert, cependant un écriteau mentionnait la présence du wifi. C’est donc tranquillement que nous déjeunions et que je consultais mes messages lorsque le garde du parc arriva nous parler et très gentiment nous remit une carte magnétique ouvrant la barrière en nous permettant gratuitement d’y passer la nuit, et quelle nuit puisque la pleine lune se reflétant sur le lac devant nous fut magnifique, mettant un terme agréable à notre séjour aux Etats Unis puisque le lendemain nous passions la frontière québécoise au nord du lac au petit poste frontière de Lacolle.

J’aborderai maintenant quelques impressions très particulières de la vie américaine qui nous ont frappé lors de cette remontée de côte est :
-          En tant qu’automobiliste, la conduite est très facile puisque tous les véhicules sont à boîte automatique et heureusement car en dehors des autoroutes, il n’y a quasiment pas de ronds-points, mais des feux tricolores pour tous les carrefours, la priorité à droite n’existe pas ce qui fait qu’on s’arrête et repart tout le temps et que les temps d’attente aux feux sont très longs.
-          On est aussi frappés de constater que le port du casque pour les motos est presque inexistant alors que le moindre cycliste en porte.
-          Attention au milieu de l’après-midi, c’est l’heure où les bus scolaires ramènent les enfants chez eux et il faut impérativement s’arrêter pour permettre leur descente aussi bien si on les suit que si on les croise.
-          Lorsqu’on a pris possession de notre véhicule on a constaté la présence de 8 porte-gobelets à bord, on a vite compris l’utilité puisque aussi bien au volant qu’ en se déplaçant à pied, un américain a toujours une boisson à la main et il est interdit de boire de l’alcool sur la voie publique, ils ont donc inventé des emballages isothermes neutres qui épousent parfaitement coca ou canette de bière…
-          Sur les autoroutes, les aires de repos sont rares et très éloignées les unes des autres, comme il n’y a pas de péage il faut prendre une sortie pour se ravitailler en essence ou pour manger et à chaque sortie on a le choix entre plusieurs stations-service ou fast-foods.
-          Au bord des autoroutes les grands panneaux publicitaires le sont peu pour des marques mais beaucoup pour les avocats vantant la résolution des problèmes de surendettement et de divorce, ainsi que d’autres panneaux condamnant  l’avortement.
-          La publicité sur la voie publique prend aussi la forme d’hommes sandwich vantant tel ou tel magasin ou tel ou tel candidat à une élection en agitant son panneau frénétiquement aux feux tricolores afin de capter votre attention.
-          On traverse beaucoup de passages à niveaux qui n’ont jamais de barrière mais des feux puissants et des signaux sonores, il n’y a souvent qu’une voie pour des transports de marchandises gigantesques et qui n’en finissent plus de passer.
-          Dans les supermarchés une personne est chargée auprès de la caissière de remplir d’innombrables sacs en plastique et vous ne prenez pas possession de votre caddie dehors mais à l’entrée du magasin, vous le laissez ensuite près de votre voiture ou plus rarement à un endroit réservé à cet effet, il n’y a jamais de consigne. Un employé les rassemble avec un engin pousseur électrique télécommandé.
-          Il faut se méfier des prix affichés dans les magasins lorsque vous faites vos courses, ils sont hors taxes, cela représente 3 à 5% de plus. De même dans les restaurants, les menus sont  hors taxes et le service n’est pas compris, là il faut carrément  ajouter 30% au prix affiché.
-          Dans certains états l’alcool n’est pas vendu en grande surface, il vous faut vous rendre dans un magasin « Vines and Liquors » pour acheter votre pack de  bières. Le vin même américain est très très cher.
-          Je ne vous apprendrai rien en disant que côté fromage c’est la standardisation à outrance, les rayons sont immenses mais proposent le même fromage (cheddar insipide) sous un nombre infini de couleurs ou d’assaisonnements, en barres ou râpés. De temps en temps un brie ou un Boursin pointe le nez et là on s’y précipite !
-          Quasiment jamais de viande de mouton mais par contre une succulente viande de bœuf très bon marché avec laquelle on n’est jamais déçu. Faut dire que les barbecues sont omniprésents.
Voilà un petit résumé de ces quelques trois mois passés aux USA, nous les retrouverons fin août plus à l’ouest . Maintenant place à la découverte du Canada et d’abord de nos cousins québécois.